Du sloubi sur l'échiquier


N'écoutant que l'éducateur qui sommeille en moi (parfois en ronflant un peu trop fort, mais il peut être actif), j'ai entrepris d'enseigner les échecs à ma fifille-5ans. En commençant par le plus simple : le déplacement du roi, et celui des pions. Quelques petites courses-poursuite entre lui et eux, à raison d'une case de mouvement par coup, voilà qui donne des bases et la compréhension que l'objectif, c'est de coincer le roi. Et puis aussi, pour qu'elle commence à visualiser le bousin, je lui ai montré la disposition des pièces en début de jeu. L'occasion de lui en donner les noms et l'emplacement. La pédagogie vous dis-je, la pédagogie. 
Et là tout part en vrille. Elle souhaite prendre une initiative qu'un papa éducatif comme moi ne peut refuser : "On va faire un jeu", dit-elle. Frétillant d'impatience devant cet exercice d'imagination, je lui réponds ok. "Il faut que tu mettes les pièces comme moi à côté", m'ordonne-t-elle. L'instruction est brutale mais je me laisse tenter. Et là, imaginez, vous, férus du jeu d'échec, le carnage. Une tour plantée en C3, une reine isolée en D5, un fou figé en A6... Vous vous imaginez ? Et moi, contraint par les règles du jeu édictées par la minus, à déposer les mêmes pièces du camp adverse à proximité de ces emplacements douteux. Mais ce n'est pas fini. Ma tchoupie m'explique fièrement que le déplacement de ces pièces obéit à son injonction, qui n'a rien à voir avec la rectitude normale d'une tour, la folie oblique d'un fou ou la liberté de mouvement d'une reine. Péniblement je la suis, ne voulant pas tuer dans l'échiquier le début d'une carrière de créatrice de jeux de société. Pour tout dire, les règles du sloubi de Kaamelott, à côté, c'est de la gnognotte. Je reste stoïque. Heureusement, un enfant de moins de 5 ans ne reste pas à jouer plus de 45 secondes au même jeu. A la moindre occasion, j'attire son attention sur un autre objet d'intérêt. "Oh, regarde, y a maman qui passe !" Merci ma Mie d'être passée. J'ai pu stopper l'humiliation de tous les Kasparov, Karpov et Fisher qui ont sacrifié dans l'histoire leur joie de vivre en l'honneur de ces petites pièces de bois. 
Voilà, c'est tout. J'ai longuement hésité à relater cet épisode peu glorieux de ma vie d'éducateur. Mais le papa amoureux de ses enfants, qui est parfaitement réveillé, lui, et pas du tout ensommeillé, se dit qu'un tel épisode de créativité et d'affranchissement des règles instituées, ne peut pas être totalement tu. Alors je vous le livre, en me disant que quoi qu'il arrive dans son apprentissage des jeux plus évolués que les petits chevaux, il en restera quelque chose de bien. Dans tous les cas, ce n'est pas un... échec ! (lol, mdr, ptdr).

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

"Mon nez il couille", ou le syndrome du Professeur Tournesol

J-24 : Quelques pages web sur les quinquas qui (re)deviennent papas

J-136. Vive le malaise vagal !