Confinement : L'aventure est au coin de la rue. Mais pas plus loin.

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Aujourd'hui j'ai fait un truc de dingue. Je n'ose pas dire "un truc de malade" parce que ce n'est pas le moment de jouer sur ce genre de mots. Aujourd'hui, malgré la peur du virus, malgré les interdictions, malgré la police qui vadrouille, je suis sorti de chez moi. Pas pour aller à la boulangerie acheter 34 baguettes, ni à la pharmacie pour dévaliser les Dolipranes 1000, non : pour aller à la benne à compostage. A cinquante mètres de chez moi. Mais j'ai eu beau chercher, le compost, ce n'est pas prévu dans la liste des dérogations au confinement. Pourtant il fallait, ça commençait à pourrir dans le sac, chez moi. Pas bon pour la santé ça, le pourrissement.
Alors j'ai coché la case "exercice physique". C'est pas faux après tout : grâce à cette longue randonnée de cinq minutes, j'ai dû tripler mon score de nombre de pas de ces derniers jours. J'ai ensuite longuement embrassé ma femme, serré ma fille dans mes bras, et j'ai poussé la porte d'entrée, puis celle de l'immeuble. Je suis parti vers la gauche, la tête baissée, marchant vite. Puis de nouveau sur la gauche. La tête me tournait, comme si j'étais ivre de l'air vif qui s'offrait à moi à grands coups de vents chaleureux emplis de la force du soleil radieux qui braillait aujourd'hui. Une voiture a circulé à mes côtés, j'ai cru qu'elle allait s'arrêter, que des policiers en civil allaient en sortir pour m'attraper avec une perche à collet, comme pour maîtriser un chien enragé à distance. Mais elle ne s'est pas arrêtée. Devant le bac à compost, j'ai dégainé mes deux petits sacs en papier pleins de restes de légumes et de fruits à moitié décomposés, j'ai ouvert le bac, je me suis pris trois milliards de moucherons dans les yeux, les narines, la bouche, les oreilles, et en apnée j'ai vidé les sacs sur les restes pourrissants qui emplissaient les trois quarts du bac. Une horreur. Mais on est écolo-bobo ou on ne l'est pas.
Une fois mon geste accompli j'ai repris ma marche, en réalisant un tour de pâté de maison qui m'a conduit devant ma porte, mais par de l'autre côté (suivez, un peu). J'ai ouvert, mon cœur battait à tout rompre, je me suis dit que ce serait bête de se faire gauler au dernier moment. J'ai refermé derrière moi et j'ai pleuré.

Un brin de culpabilité

Bon ok, j'exagère les faits. D'autant que j'étais couvert par mon attestation sur l'honneur et que je n'ai croisé personne. J'ai juste eu une petite culpabilité, car je ne supporte pas ces gens qui prennent prétexte de la possibilité d'un exercice physique à proximité, pour faire un semi-marathon sur les bords de Seine ou sur la coulée verte du sud parisien. Ce n'était pas mon cas, bien sûr, on en était loin. Mais une petite entorse à la règle, multipliée par des dizaines de milliers d'innocents comme moi, ça fait des dizaines de milliers de petites occasions pour le virus de se répandre. Et encore, je me dis que j'ai conscience de ce que je fais. La plupart des personnes qui se "baladent" pour "prendre l'air" dans des milieux peuplés propices au partage de microbes, eux, ne semblent pas réaliser la portée des risques qu'ils provoquent. C'est intolérable, égoïste, et ce, d'autant que cela conduira inévitablement le gouvernement à prendre des mesures toujours plus coercitives pour maintenir les gens chez eux.
Pendant ce temps, demain, c'est le printemps. Une dernière journée d'hiver, et on entame une autre saison, une belle saison, celle du réveil de la nature, de la renaissance, et donc, de l'optimisme. Courage à toutes et tous.

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